Au sommaire de Système D n°22, à télécharger ci-dessous : l’autonomie, l’agrégation, entretien avec Olivier Godechot, les recrutements et la CJC.
Sommaire
- Éditorial : Autonomie à contre-sens
- Dossier : Faut-il brûler l’agrégation ? avec une interview de Daniel Gaxie
- Recrutements : session automne 2006 et session printemps 2007 et une interview d’Olivier Godechot
- Relations extérieures : La galaxie CJC. De l’anarchie au libéralisme
- Quatrième de couv’ : Les prises de tête des matheux ont parfois du bon
Compléments sur le localisme
Ci-dessous, nous reproduisons la version longue de notre entretien avec Olivier Godechot, qui revient sur les résultats d’une recherche menée avec Nicolas Mariot, initialement publiée pour partie dans Système D n°14, ainsi que dans Palaestra et la Revue Française de Sociologie (documents téléchargeables en fin de texte). De nouvelles données sur le localisme, par Olivier Godechot et Alexandra Louvet, ont été publiées dans La vie des idées et discutées dans plusieurs revues.
De quelles données dispose-t-on aujourd’hui pour mesurer la part du localisme en matière de recrutement dans la recherche et l’enseignement supérieur ?
Le ministère publie chaque année depuis quatre ou cinq ans des enquêtes sur les recrutements des enseignants chercheurs. Sur le site suivant : ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/personnel/enssup/, on peut trouver une série de rapports sur l’Origine des enseignants chercheurs recrutés lors de la campagne 2006, [resp. 2005, 2004, 2003, 2002]. Ces enquêtes sont effectuées, il me semble, à partir du dispositif d’inscription ANTARES.
Ces données publiées sont utiles et intelligemment présentées. En effet, le ministère distingue plusieurs formes de localismes : candidat ayant à la fois soutenu son doctorat dans l’université et effectué un service d’enseignement, candidat ayant soutenu son doctorat dans l’université mais ayant effectué un service d’enseignement ailleurs ou n’ayant pas enseigné, candidat ayant soutenu ailleurs mais ayant travaillé comme moniteur ou ATER dans l’université, candidats externes de la même académie … Ces différentes catégories de « localisme » sont ensuite croisées avec les universités, les grandes disciplines (lettres, droit, sciences) et les statuts des candidats.
Ces publications permettent de mesurer le taux brut de localisme. Mais elles ne permettent pas de cerner complètement le « biais localiste », c’est-à-dire la préférence systématique pour les candidats « locaux ». En effet, et je voudrais insister sur ce point, le localisme est quelque chose d’assez complexe à mesurer rigoureusement.
Par exemple, un taux de localisme de 25% n’a pas la même signification dans une discipline où il y a quatre établissements qui produisent des docteurs et qui recrutent et dans une discipline où il y en cinquante. Dans le premier cas, en admettant que les établissements sont de taille équivalente, il n’y a pas de préférence locale. Dans le second, au contraire elle est très forte.
De même, un taux de localisme brut de x% n’a pas la même signification dans un gros établissement que dans un petit établissement ou encore dans un établissement en haut de la hiérarchie du prestige et en bas de la hiérarchie du prestige.
Pour pouvoir mesurer le « biais localiste », il faut se donner un point de comparaison abstrait, hypothétique, c’est-à-dire un univers idéal où les départements universitaires recruteraient sans tenir compte du caractère local ou non du docteur. La construction de ce point comparaison est complexe et repose nécessairement sur une série d’hypothèses ad hoc sur les préférences des candidats, sur la structure de compétition pertinente, sur l’éventuelle hiérarchie des établissements, etc. Pour pouvoir mesurer le biais localiste, il faut pouvoir constater non seulement le recrutement tel qu’il est mais aussi reconstruire le recrutement tel qu’il aurait pu être en délimitant la liste des rivaux potentiels pertinents. Celle-ci ne se réduit pas à la liste des candidats ayant envoyé par exemple leur dossier. Il faut aussi tenir compte du fléchage, lequel dans certains cas (mais pas toujours) a été défini pour favoriser des candidats connus, les candidats locaux.
Nous avions essayé de mener un tel travail avec Nicolas Mariot dans Système D et dans la Revue Française de Sociologie à propos de la science politique justement[[Olivier Godechot, Nicolas Mariot, « Devenir des docteurs de science politique et « localisme ». Premiers éléments d’enquête« , Système D, n°14, avril 2003, p. 3-9 ; ibid., « Les thèses de science politique et leurs jurys. Premiers éléments d’enquête« , Palaestra, n°9, mars 2003, p. 62-86 ; ibid., « Les deux formes du capital social. Structure relationnelle des jurys de thèse et recrutement en science politique« , Revue française de sociologie, vol. 45, n°2, p. 243-282.]]. On avait trouvé que le « localisme » en sciences politiques sur les postes de MCF était donc de 44%, alors qu’on attendrait, à l’indépendance, à 7%[Ibidem.]. J’essaye de généraliser cette méthode avec Alexandra Louvet sur des données à la fois très riches et très pauvres : la base DOCTHESE des thèses soutenues en France de 1972 à 2000, fichier énorme de 220 000 thèses où l’on n’a aucune information sur le recrutement mais où l’on peut voir des docteurs réapparaître quelques années plus tard dans la base de données dans le rôle de directeur de thèse lorsqu’ils font soutenir leurs propres docteurs et ce, bien souvent (44% des cas), dans l’établissement où ils ont soutenu leur propre thèse. Les données du ministère sur l’ensemble des disciplines indiquent un taux brut de localisme 30% au concours de maîtres de conférences. Il est probable que ce taux localisme soit dix fois supérieur au taux de localisme que l’on trouverait à l’indépendance (que j’estime pour l’instant à environ 3%).
Il est important de comprendre que lorsque l’on regarde de l’extérieur un recrutement donné, on peut difficilement dire s’il révèle un « biais localiste ». On ne peut le faire qu’en se mettant à la place du jury et en comparant les dossiers termes à termes, pour voir si le candidat local recruté est « meilleur » que les externes refusés. Mais d’un point de vue statistique, on dira : « on a recruté un local alors qu’à l’indépendance on devrait en recruter 0,03″… Or on ne peut pas en couper les individus en morceaux. Le biais localiste ne peut donc s’apprécier que sur de grandes masses. Dans une discipline donnée, on ne pourra apprécier le localisme d’un établissement qu’en réunissant dix à quinze années de concours.
Dans une tribune publiée en juin dans le journal Le Monde [[Olivier Godechot, « Recrutement, autonomie et clientélisme », Le Monde, 26 juin 2007.]], vous plaidez pour l’interdiction du localisme. Qu’est ce qui, à vos yeux, justifie une telle proposition ?
Dans cette tribune, je propose effectivement d’interdire aux universités de recruter comme maître de conférences un candidat qui a obtenu le doctorat en son sein depuis moins de quatre ans. Cette proposition n’est pas très originale et il serait absurde de m’en accorder la paternité exclusive.
Pourquoi une telle mesure ? Elle vient d’un diagnostic général : lors du processus de recrutement, la proximité personnelle au jury joue un rôle trop important par rapport à l’évaluation des compétences de chercheur, d’enseignant, voire même d’administrateur. Il ne s’agit pas de dire « il y a les purs d’un côté et les impurs de l’autre » et de se reposer sur une condamnation morale des seconds, aussi inutile qu’hypocrite. Il s’agit de trouver un dispositif de régulation d’une tendance qui nous hante tous, qui a aussi sa propre moralité (la fidélité), mais qui généralisée contredit les normes morales du monde académique (l’excellence scientifique).
Cette mesure n’est pas parfaite. Elle ne cible qu’une forme de proximité : le fait d’avoir été un ancien docteur (et souvent collègue) dans l’établissement. Il existe d’autres formes d’autorecrutement : on peut être recruté par un ancien condisciple issu de la même école ou de la même université, par un membre de son jury de thèse ou encore dans une université où son directeur a exercé quelques années auparavant et où il garde des contacts.
Pis encore, cette mesure autoritaire a bien sûr quelque chose d’inadmissible. Elle oblige dans certains cas à aller chercher ailleurs quelqu’un de moins sûr, qu’on connaît moins bien, alors qu’on a chez soi quelqu’un qu’on connaît, qu’on apprécie et qui fait parfaitement l’affaire.
Toutefois cette mesure a aussi pour elle un grand nombre d’avantages. Premièrement, elle est simple et facile à mettre en place. Non seulement il serait très difficile d’interdire toute interférence des relations personnelles dans le recrutement (en raison de la difficulté à les observer et à les définir), mais dans un monde où la valeur des individus se construit le long des lignes du réseau, cela pourrait conduire à paralyser totalement le recrutement. Mais interdire le localisme correspond à l’interdiction de la forme la plus massive d’autorecrutement sans pour autant paralyser le recrutement[[Il n’y a guère que dans les toutes petites disciplines comme les Études Indiennes où cela pourrait poser un problème.]]. Lorsque l’on travaille sur le recrutement avec les outils d’analyse des réseaux, on peine à mettre en évidence des effets de réseaux distants tant le localisme surclasse les autres phénomènes.
Certains critiques de ma proposition disent que cette interdiction entraînera « des échanges de bons procédés entre les universités » pour le recrutement mutuel de docteurs et que le remède serait « pire que le mal ». Il est certain que l’interdiction du localisme favorisera la mobilisation de contacts plus lointains. Mais imposer un nom auprès de contacts éloignés est une opération plus difficile que de le faire dans une communauté de travail qui se côtoie toute l’année. Il faut être en contact avec un nombre suffisant de personnes pour obtenir la majorité. Les calendriers de disponibilité des postes, de production de docteurs, etc. ne coïncident pas forcément pour faire du donnant-donnant. On peut facilement déroger à l’obligation de réciprocité. Bref, je ne pense pas que ce possible effet pervers soit si important que cela. Je vois mal comment il pourrait être plus important que les effets pervers liés à la situation actuelle.
Bien sûr, ce serait merveilleux si on pouvait arriver au même résultat autrement, sans avoir à passer par la case interdiction du localisme. L’initiative de l’ANCMSP, de Baptiste Coulmont, ou des mathématiciens de favoriser la transparence en publiant la liste des candidats auditionnés et classés est ainsi excellente. Elle peut contribuer à changer les choses. Il faudrait non seulement l’encourager mais aussi la pérenniser en rendant cet affichage obligatoire sur les sites internet des universités[[Il est quand même curieux que la liste des candidats qualifiés soit publiée dans le Journal Officiel alors que celle des candidats recrutés ne l’est nulle part.]].
Mais je crains que ce ne soit pas suffisant. Le rôle de la l’interdiction du localisme jouerait potentiellement le même rôle que la loi sur la parité dans les scrutins de liste où l’on impose l’alternance obligatoire des hommes et des femmes : bouleverser par la contrainte les pratiques pour transformer durablement les normes. Et ce n’est qu’une fois que ces dernières sont transformées, que l’on peut envisager un assouplissement de la contrainte.
On m’a ainsi écrit suite à mon article dans Le Monde pour suggérer qu’il fallait sanctionner les établissements trop « localistes » plutôt que d’interdire le localisme :
Il existe une réponse beaucoup plus simple et efficace pour faire de la politique scientifique : les tutelles. On connaît plusieurs exemples ou le CNRS a sanctionné un laboratoire pour localisme, en lui retirant un poste de CR l’année suivante. Il suffirait de systématiser ces pratiques en renforçant le pouvoir et les moyens de nos tutelles.
Cette solution me paraît difficile. Sur la base d’un raisonnement statistique, le localisme d’un établissement donné, une année donnée, est difficile à apprécier, en raison de la petitesse des effectifs en jeu. Ou bien alors il faudrait refaire entièrement le processus d’évaluation des candidats. C’est pourquoi je propose une mesure générale aussi imparfaite soit-elle qui traite le phénomène à la fois globalement et très simplement.
L’interdiction du localisme ne risque-t-elle toutefois pas de renforcer les inégalités sur le marché du travail académique entre les docteurs issus d’établissements prestigieux comme Paris 1 ou Sciences-Po et les autres ?
Il y a inégalités et inégalités. Le monde académique, fondamentalement inégalitaire, estime généralement que les inégalités en matière de capacité d’enseignement et de recherche sont légitimes et qu’elles doivent être consacrées et que les inégalités dans d’autres dimensions extra-scientifiques et extra-pédagogiques (sexe, richesse, origine sociale, relations, etc.) sont illégitimes et non-pertinentes. Le problème, c’est que ces deux ordres d’inégalités ne sont pas indépendants. Le recrutement doit-il être le lieu de compensation d’inégalités extra-scientifiques au risque de subvertir sa hiérarchie scientifique ? C’est une politique que l’on peut légitimement prôner mais dont il faut savoir mesurer tous les tenants et aboutissants.
En empêchant le biais local de se manifester, on oblige les universités à choisir entre des extérieurs qu’elles connaissent moins. Elles seront sans doute plus enclines à utiliser des critères académiques pour faire leur choix. Cela favorisera les docteurs extérieurs qui ont plus de publications, qui ont manifesté leur capacité d’exposition par la réussite à des concours et qui bien souvent viennent des établissements les plus prestigieux. Cette inégalité entre en congruence avec l’élitisme académique même si elle est aussi le produit d’inégalités extra-scientifiques antérieures et extérieures.
Toutefois nuançons quelque peu cet avantage conféré aux établissements les plus prestigieux.
Premièrement, les établissements prestigieux seront aussi gênés pour recruter leurs propres docteurs. Le localisme en haut de la hiérarchie existe aussi à Paris I, à l’IEP, à l’EHESS. Ceci obligera donc à une certaine forme de redistribution (si ces établissements s’abstiennent de recruter tout leur personnel à la mutation).
Deuxièmement, l’interdiction du localisme pourra à moyen terme modifier la situation d’établissements peu prestigieux et très endogames. En contraignant un département à recruter à l’extérieur, on l’oblige à s’ouvrir à des éléments externes peut-être susceptibles de le faire sortir de l’équilibre bas dans lequel sa consanguinité l’emprisonne.
Une agrégation du supérieur comme il en existe en science politique, en économie ou en droit constitue-t-elle à vos yeux un mode de recrutement préférable ?
Sur le principe, je suis assez favorable à un concours national comme il en existe pour les organismes de recherche ou l’enseignement secondaire. Mais l’agrégation du supérieur a un certain nombre d’inconvénients qui font qu’elle ne saurait être généralisée telle quelle comme mode de recrutement des professeurs. La leçon de 24 heures (supprimée récemment en science politique et en économie) est une épreuve qui favorise outrageusement les candidats parisiens (qui disposent d’une « équipe » sur place) sur les autres candidats. Plus généralement, la forme du concours accorde peut-être un peu trop d’importance aux capacités rhétoriques, aux talents d’orateurs et de pédagogues, par rapport aux compétences de chercheur.
Ce concours, très lourd et sportif, tend aussi à attirer surtout les candidats jeunes. Le fait de pouvoir devenir très jeune professeur est certes une bonne chose. Mais cela introduit un déséquilibre morphologique dans la discipline entre une petite élite qui accède vite au rang de professeur et une masse de maîtres de conférences vieillissants et renonçant à un concours qui ne semble pas fait pour eux.
Rien n’empêche bien sûr de rééquilibrer l’épreuve pour faire face à certains défauts. Mais s’il faut imposer une épreuve nationale, je préfère qu’elle soit organisée au niveau des maîtres de conférences que des professeurs.
De quels dispositifs en vigueur dans les autres pays pourrions-nous, selon vous, nous inspirer ?
Ce que je vais dire sera sans doute partiel car je ne suis pas du tout un expert des différents systèmes académiques[[Pour une comparaison bien plus sérieuse, cf. Musselin Christine, Le marché des universitaires. France – Allemagne – Etats-Unis, Presses de Sciences-Po, 2005.]]. Aux États-Unis, le recrutement local n’est pas formellement interdit (il peut être pratiqué dans certains établissements d’élite comme le MIT ou Harvard) mais il est largement condamné et reste très rare au niveau des assistant professors. En revanche, les enseignants sur des tenure tracks [[Système en vigueur aux Etats-Unis par exemple, où les candidats à un poste sont recrutés pour une durée plus ou moins longue mais déterminée (plusieurs années), au bout de laquelle ils doivent le quitter l’établissement s’ils n’ont pas été confirmés par une embauche (tenure) dans celui-ci.]] deviennent généralement full professors dans leur établissement. En Allemagne et en Suisse, la mobilité est obligatoire entre le poste d’assistant et celui de professeur et les postes d’assistant sont à durée limitée (6 ans) non renouvelables, au terme duquel le candidat passe l’habilitation.
Il faut distinguer deux choses : l’organisation de la mobilité et l’instabilité de l’emploi.
Il vaut mieux, je pense, imposer, comme aux Etats-Unis, une mobilité obligatoire à l’entrée de la carrière académique qu’au milieu de celle-ci comme en Allemagne. Un maître de conférences peut avoir beaucoup investi non seulement dans la construction de ces cours, mais aussi dans la prise en charge des cursus, d’un département, d’une UFR, investissements qu’une mobilité obligatoire pour obtenir le rang de professeur pourrait dévaluer. La mobilité obligatoire se marie mieux avec le changement plus fondamental de statut lorsque l’on passe de doctorant à maître de conférences.
En revanche, je suis hostile à l’introduction d’une tenure track à la française ou pire à des postes d’assistant à durée déterminée et non-renouvelable comme en Allemagne. Il est possible de rendre la carrière d’enseignant-chercheur plus incitative sans adopter pour autant le bâton de la précarisation, aux effets potentiellement délétères et contreproductifs.
Que pensez-vous de l’idée d’accroître l’autonomie des universités en matière de recrutement comme le prévoit le projet de loi en préparation du gouvernement ?
Il y a deux volets dans la réforme.
Premièrement, la gestion des postes. Que l’université gère son budget et puisse créer plus facilement et rapidement des postes, soit ! Même s’il y a des risques[[Cela peut encourager le président à transformer des crédits de personnel en crédits matériels, immobiliers notamment, transformation irréversible selon la LOLF.]].
Deuxièmement, la sélection des candidats. Il est difficile d’évaluer complètement les effets de cette réforme parce que l’on ne sait pas à l’avance ce qui va changer. Tout dépendra de la pratique des universités. Les commissions de spécialistes, institutions collégiales, sont remplacées par des comités de sélection nommées par le conseil d’administration. Certes le passage d’un tiers de membres extérieurs à la moitié de membres extérieurs détourne un peu ces nouveaux comités du recrutement local. Mais les membres extérieurs restent choisis par l’université et ne jouent pas toujours le rôle de contrepoids suggéré par leur effectif numérique. Ils ne sont pas toujours enclins à s’opposer aux souhaits de recrutement de ceux qui les ont désignés.
Les universités peuvent donc très bien reconduire sous le nom de « comité de sélection » les instances et les pratiques antérieures (et c’est ce qui va probablement se produire dans un premier temps). Mais à moyen terme, cela peut aussi bien favoriser un recrutement plus élitiste qu’un recrutement plus clientéliste.
Dans quelques universités d’élite où les présidents sont particulièrement attentifs à place de leur établissement dans le classement mondial des universités, les conseils d’administration pourront mettre leur pouvoir accru au service d’un recrutement fondé sur les standards internationaux d’excellence académique (liste de publications, etc.). Dans les autres universités où cet enjeu est plutôt secondaire par rapport à la gestion quotidienne du flux d’étudiants, cela risque plutôt d’aggraver les différentes formes de clientélisme, en particulier si le président ajoute ou même substitue son propre réseau personnel à ceux des professeurs des différents départements. La part des personnalités extérieures dans les conseils d’administration peut faire craindre aussi le parachutage de personnalités politiques ou économiques régionales, que ce soit dans le cadre des recrutements par le « comité de sélection » ou plus encore dans le cadre du recrutement direct « d’agents contractuels » par le président lui-même.
Quel sera l’équilibre global ? Tout dépend des modalités de contrôle et d’incitation des établissements par le gouvernement. En l’état, je crains qu’il soit dans l’ensemble plutôt favorable à des formes de clientélisme renouvelées et centrées sur le conseil d’administration et son président.