Science politique : une marginalisation inquiétante

L’Association Nationale des Candidats aux métiers de la Science Politique (ANCMSP) s’alarme de la situation de la science politique au sein de différents sites universitaires.


Structurellement dominée dans des départements juridiques, la science politique pâtit depuis longtemps de cette situation. La loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) constitue une nouvelle fenêtre d’opportunité utilisée pour marginaliser davantage notre discipline. Certains sites le montrent, que cela soit à travers une décrue des financements doctoraux ou à travers la fermeture de diplômes.

À Toulouse, le dernier rapport de l’AERES sur le LaSSP (EA 4715) fait état d’une recherche de qualité menée au sein de ce laboratoire. Il note, toutefois, un éloignement croissant entre ce laboratoire et l’université de Toulouse 1. L’ANCMSP, dans une lettre adressée au président de l’université et au directeur de l’Ecole doctorale a souligné cet éloignement particulièrement manifeste en ce qui concerne les financements de thèse, les charges d’enseignement des contrats doctoraux attribués aux doctorants du LaSSP et les formations proposées au sein de l’École Doctorale de Sciences Juridiques et Politiques. La marginalisation croissante des doctorants du LaSSP au sein de l’école doctorale de droit et science politique et de l’université risque de fragiliser non seulement cette équipe de recherche mais également la dimension interdisciplinaire des structures qui l’accueillent. La pérennité des financements pour des thèses en science politique menées au sein de ce laboratoire semble donc fortement compromise.

À Rennes, la science politique divisée entre Rennes 1 et l’IEP a pour conséquence de reporter l’essentiel de l’encadrement des Jeunes chercheurs sur l’Institut d’Etudes Politiques. Le financement des thèses, les opportunités d’assurer des heures d’enseignements et l’encadrement en terme de formation sont ainsi toujours incertains et doivent compter chaque année sur l’activisme d’une équipe d’enseignants-chercheurs. Le défaut de concertation dans les recrutements peut conduire à durcir les clivages et à nourrir des divisions qui éclatent les forces de notre discipline.

A Strasbourg, enfin, un diplôme de Master 1 de science politique qui existait depuis quinze ans a été menacé de fermeture par la Faculté de droit de la nouvelle université de Strasbourg en dépit de ses importants effectifs. Le diplôme n’a dû de survivre à cette décision de fermeture brutale qu’à la mobilisation des enseignants-chercheurs. Les conditions y restent cependant précaires : rattachement du diplôme à une autre composante de l’université de Strasbourg, l’Institut des Hautes Etudes Européennes ; absence de locaux dans lesquels faire cours, si ce n’est une salle annexe de la bibliothèque des sciences…

Trois sites, trois situations. Si ce portrait n’est pas exhaustif, il incite cependant à une prise de conscience collective de cette nouvelle vague de marginalisation et doit conduire à une plus grande vigilance pour coordonner la défense de notre singularité.

Plus généralement, l’état des recrutements dans notre discipline devrait servir d’alerte générale auprès de tous les politistes : le faible nombre de postes offerts crée des situations inacceptables pour les candidats aux métiers de la science politique, comme le fait que les postes laissés vacants (mutation, agrégation) soient remplacés tardivement et compensés par des vacations et des heures supplémentaires. Il est de même à déplorer que certains postes ouverts ne soient pas pourvus, et ce alors même que le nombre de candidats est très supérieur au nombre de postes.

L’engagement des enseignants-chercheurs titulaires aux côtés des candidats aux métiers de la science politique doit redoubler dans la conjoncture actuelle de la discipline, et l’ANCMSP appelle à une mobilisation plus intensive sur l’ensemble des sites concernés par l’enseignement et la recherche en science politique.

L’ANCMSP