Communiqué de l’ANCMSP sur les financements par contrats

La mise en place du contrat doctoral et de la LRU accentue la précarité des jeunes chercheurs et s’accompagne de sérieuses entorses au droit du travail universitaire. L’occasion de rappeler que tout(e) jeune chercheur(se), doctorant(e) ou jeune docteur(e), mérite une rémunération honnête.


L’Association Nationale des Candidat(e)s aux Métiers de la Science Politique tient à attirer l’attention sur des situations et des propositions de financements contractuels qui accroissent encore la précarité des jeunes chercheurs(euses). Dans un contexte de réduction de moyens, non seulement les recrutements par libéralités/vacations/CDD se développent et contribuent à fragiliser les carrières des doctorants et des docteurs, mais on voit aussi cette précarisation toucher des postes plus avancés dans la carrière.

CLARIFIER LES OFFRES D’EMPLOI FAITES AUX JEUNES CHERCHEURS

Il n’est un secret pour personne que de nombreux(ses) (ses) doctorant(e)s et jeunes docteur(e)s gagnent leur vie en donnant des cours. Beaucoup de cours. Vacations, contrats dans l’enseignement supérieur public et privé, tout est bon à prendre pour s’assurer un revenu via une activité aussi proche que possible de la recherche. Tout est bon à prendre ? Tel n’est pas l’avis de l’ANCMSP dont la liste de diffusion a publicisé ces derniers mois à son corps défendant plusieurs offres de travail de recherche et d’enseignement des plus floues.

Si la plupart des offres énoncent clairement le statut du contrat et les droits associés, d’autres ne précisent rien, ou presque : tout se passe alors comme si une perspective d’embauche dans l’enseignement supérieur et la recherche était en soi une gratification suffisante. Nous appelons les établissements proposant des emplois à préciser clairement le statut et les conditions exactes du contrat qui sera signé, ainsi que le travail demandé.

En outre, certains emplois offrent aux candidats un délai ridiculement court précédant leur entrée en fonction. Publier un poste à pourvoir dix jours avant la rentrée – comme cela s’est vu sur notre mailing-list – oblige le recruté à bouleverser le calendrier de ses autres travaux et à bâcler sa préparation. Ceux qui recrutent un enseignant doivent lui laisser un délai nécessaire et raisonnable (un minimum de trois semaines semble la limite de l’acceptable), entre l’embauche et son entrée dans la fonction, pour s’organiser et préparer ses cours.

REFUSER LES OFFRES ILLÉGALES

Certaines offres d’emploi dans la recherche assument impunément leur illégalité. Depuis sa création en 1995, l’ANCMSP dénonce ces situations où le travail de recherche est rémunéré sous forme de « libéralités » – bourses sans droits sociaux, qui plus est rarement versées mensuellement, et pouvant comporter des clauses de remboursement si le travail est jugé insatisfaisant. Ce type de financement, qui prive les jeunes chercheurs(euses) de protection sociale et d’indemnités lors de leur périodes de chômage, est illégal au regard du Code du travail, ce que le ministère a rappelé par une circulaire en 2006.

L’ANCMSP salue ceux qui contribuent, par leur attention aux conditions d’accueil des jeunes chercheurs, à rendre moins difficile l’épreuve que constitue les débuts de carrière professionnelle. A contrario, elle appelle les enseignants-chercheurs titulaires à refuser ces financements illégaux et à développer la recherche de financements légaux.

LA PRÉCARISATION MONTE EN GRADE

« L’ancien se meurt, le nouveau ne parvient pas à voir le jour, dans cet interrègne surgissent les monstres ». L’ANCMSP a pris connaissance cette année de nombreux abus consécutifs à la mise en œuvre du contrat doctoral, instauré par le décret du 23 avril 2009.
Nous avons notamment été informés du cas de nombreux(ses) allocataires de recherche auxquels un contrat de monitorat avait été promis avant ce décret, et qui se sont vu transformer abusivement leurs heures de monitorat en heures de vacations, payées trois fois moins cher. Le contrat doctoral devait mettre fin à ces pratiques douteuses…

Certaines universités transforment également des postes de titulaires en postes de contractuels. Alors que les postes de titulaires sont déjà largement insuffisants, on observe la persistance, sinon l’expansion, de pratiques discrètes de suppression des postes laissés vacants, en remplacement desquels des contrats temporaires sont assemblés en dernière minute. La banalisation de cette tendance, dont témoigne l’apparition à cette rentrée d’une offre, légale, parlant de « MCF en CDD », devrait tous nous alerter sur la situation actuelle.

Dans les faits, on économise de l’argent sur une main d’œuvre qui ne peut pas se défendre, et qui se retrouve à travailler toujours plus pour gagner moins, et voit sa précarité toujours prolongée.
L’ANCMSP souligne que ces errements sont autant à mettre au passif d’une organisation du travail universitaire oublieuse de ses conditions matérielles d’existence, que des conditions d’application de la loi LRU qui met de fait les universités en situation de devoir gérer un manque généralisé de financements adéquats.

TITULAIRES, VOUS ÊTES RESPONSABLES DE CELLES ET CEUX QUE VOUS RECRUTEZ

L’ANCMSP demande aux directeurs(rices) d’établissements, d’écoles doctorales et de laboratoires et tous les autres acteurs concernés par l’emploi des jeunes chercheurs(euses) de s’assurer des conditions de travail qui leur sont offertes:
– vérifier la nature des financements proposés par leurs institutions
– refuser les libéralités et proposer ou aider à la recherche de contrats de travail en bonne et due forme, d’une durée compatible avec la conduite de la recherche pour laquelle ils recrutent, donnant droit enfin à l’ouverture de droits sociaux.
– recruter des doctorants contractuels plutôt que des vacataires; des enseignants-chercheurs titulaires et non de jeunes docteurs contractuels.

L’application de ces règles ne se fait pas sans but : elles s’inscrivent dans une vision du professionnalisme et de l’intégrité scientifique que l’ANCMSP défend depuis sa création.

L’ANCMSP encourage les candidat(e)s aux métiers de la science politique à rester vigilants et mobilisés pour faire barrage aux mesures qui les pénalisent dans leurs conditions de financement et de travail.