Contribution de l’ANCMSP à la loi de programmation pluriannuelle de la recherche

Contribution sur le thème « transparence des recrutements dans l’ESR »

Recrutements en Post-Doctorat

En science politique, sociologie, et dans l’ensemble des disciplines de ALLSHS, les recrutements en CDD de recherche dits “post-doctorat” se font dans l’opacité la plus totale. Alors même que ces contrats sont souvent financés sur fonds publics, leur mise au concours ne fait souvent l’objet d’aucune publicisation, à l’inverse des emplois d’ATER, de maître de conférence et de professeur des universités. Nous demandons ainsi la mise en place d’une plateforme (indépendante, ou au sein de Galaxie) afin qu’y soient renseignés systématiquement les contrats dits post-doctoraux.

Recrutements maîtres de conférence

Depuis 1995, l’ANCMSP collecte sur son site internet les offres de postes de MCF mis au concours en section 04, ainsi que les dates de sélection, d’auditions, les compositions des comités de sélection, puis les listes de candidats auditionnés et le classement final. La plupart des universités communiquent publiquement sur notre liste de diffusion leur calendrier, la composition des jury de sélection, les listes des candidats auditionnés et classés. Toutefois, nous déplorons que certaines ne le fassent pas spontanément, et les sollicitons annuellement pour qu’elles nous transmettent ces informations. Nos pages de suivi des recrutements sont très consultées (17 500 consultations pour la session synchronisée 2018 par exemple), et leur mise à jour répond à une demande forte de transparence dans la mise au concours des postes de MCF. Malheureusement, peu de disciplines pratiquent un suivi des recrutements similaires.
Nous relevons annuellement des cas de recrutements irréguliers – typiquement, présence dans le jury du directeur de thèse du candidat auditionné. Ceci est à prévoir cette année, compte tenu de la composition de certains jurys et des listes des futurs auditionnés. Cette situation contrevient à la jurisprudence, notamment l’arrêt nº 386400 du Conseil d’État du 17 octobre 2016, et à la note de déontologie publiée au Bulletin officiel par le MESRI le 21 février 2019. Face à pareilles situations, nous alertons recruteurs et candidats avant la tenue des auditions, par message privé et/ou public sur notre mailing-list réunissant 4700 chercheurs. Si cela s’avère insuffisant pour que la régularité de la procédure de recrutement soit respectée, nous accompagnons les candidats qui le souhaitent dans la procédure de demande d’annulation du recrutement au tribunal administratif (cas de Sciences Po Lille en 2018), et si nécessaire, entendons la solliciter nous-même.
Au vu des irrégularités persistantes dans la procédure de recrutement, et pour permettte plus transparence, une mesure légère consisterait à ce que le MESRI mette à jour le site Galaxie, afin que les informations suivantes y apparaissent : composition des comités de sélection ; dates de sélection et d’auditions ; liste des auditionnés et classement final.

Recrutements contrat d’ATER

La Plateforme Altaïr sur Galaxie permet désormais la publicisation à large échelle des mises au concours de postes d’attaché temporaire d’enseignement et de recherche. Malheureusement, plusieurs universités persistent à refuser de déposer les postes d’ATER mis au concours sur Altaïr. Il est important de passer au 100% Galaxie dans les prochaines années.

Recrutements CNRS

De nombreuses contestations et scandales ont émaillé les recrutements au CNRS dans les dernières années. Ceux-ci ont un point commun, celui d’avoir eu pour point de départ des « déclassements ». La structure de ces concours de la Fonction publique est classique, avec deux jurys, l’un d’admissibilité, l’autre d’admission. L’ANCMSP ne remet pas en cause ce principe. Cependant, les jurys d’admission ne sont pas tenus légalement de justifier leurs décisions ; les candidat·e·s n’ont donc aucun recours juridique possible pour contester une décision de ces jurys. Ce fonctionnement est contraire à celui qui prévaut pour les recrutements de maîtres·ses de conférences et de professeur·e·s des universités. Pour l’ANCMSP, cette situation où une entité produit des décisions administratives qui ne peuvent pas être contestées juridiquement est une anomalie, qui conduit à une perte de confiance des candidat·e·s dans l’égalité face aux concours. L’ANCMSP recommande ainsi une modification législative afin que le CNRS ainsi que les autres EPST suivant le même régime soient alignés sur le droit des recrutements de maîtres de conférences, c’est-à-dire que leurs jurys d’admission soient contraints légalement de fournir des justifications juridiquement opposables de leurs décisions.

Contribution sur le thème “Précarité des jeunes chercheurs” correspondant au groupe de travail Attractivité des carrières et des métiers scientifiques

Situation des enseignants vacataires

La situation des enseignants vacataires est aujourd’hui très problématique. L’ANCMSP estime, à partir des notes de la DGRH sur les enseignants non permanents, le nombre d’enseignants vacataires à 133 665, dont 17 400 effectuent au minimum 96 heures d’enseignement équivalent TD. En modélisant par une fonction exponentielle négative la relation entre un nombre d’heures de vacation effectuées par un·e vacataire et le nombre d’enseignant·e·s vacataires effectuant ce volume horaire, les vacataires effectuant plus de 96 hETD/an assureraient en moyenne 143 hETD/an, soit 75% de la charge d’enseignement d’un professeur des universités ou d’un maître de conférence. Ce volume d’enseignement est ainsi très loin du cas du vacataire occasionnel, intervenant ponctuellement pour partager son expérience professionnelle au sein d’un cursus universitaire (voir notre étude à ce sujet : https://ancmsp.com/vacations-contrats-lru-et-postes-de-titulaires)

Ces données témoignent d’une généralisation très problématique du recours aux vacataires par les universités. Rappelons que l’heure de vacation est rémunérée 41,41 euros brut, tandis que selon l’Arrêté du 31 juillet 2009 approuvant le référentiel national d’équivalences horaires dispose qu’une heure équivalent TD est équivalente à 4,2 heures de travail effectif. Ainsi, ramenée à l’heure de travail effectif, les vacations d’enseignement sont aujourd’hui rémunérées sous le SMIC horaire. En plus de cela, les enseignants vacataires ne disposent – au titre du caractère “occasionnel” de la vacation, largement contredite par les données produites par la DGRH – d’aucune protection sociale, et sont payés plusieurs mois après la fin de leur service d’enseignement. La circulaire n° 2017-078 relative aux délais de paiement des vacataires de l’enseignement supérieur n’a rien changé à ce propos.

Les universités abusent du recours aux vacataires, qu’elles se révèlent en plus de cela incapables de respecter dans l’exercice de leurs missions.

Nous proposons ainsi :

  • L’abrogation du statut d’attaché temporaire vacataire (ATV), qui correspond aux doctorants sans financement réalisant des vacations dans une limite de 96 heures équivalent TD par an, et la contractualisation des doctorants actuellement vacataires sous statut “ATV”.
  • La production par les services du MESRI d’une enquête statistique sur le volume horaire moyen réalisé par les vacataires effectuant au moins 96 heures équivalent TD par an et le nombre qu’ils représentent. Les résultats de cette enquête permettront d’affiner les données dont dispose actuellement le MESRI et de recenser les universités détournant le décret n°87-889 du 29 octobre 1987 en recrutant des enseignants vacataires effectuant des services d’enseignement proches des personnels contractuels et permanents, ainsi que le volume d’heures d’enseignement que ces vacataires assurent.
  • L’augmentation immédiate du tarif horaire de la vacation. Une augmentation conséquente du tarif horaire permettrait de limiter le recours abusif aux vacataires sur les missions permanentes des établissements et rendre plus avantageux pour ces derniers le recrutement de personnels contractuels ou titulaires.