Recrutements CNRS Voie Handicap : Entre opacité et informalité

Communiqué de l’ANCMSP – 11 février 2021


Le bureau de l’ANCMSP saisit ce moment de pré-campagne de recrutement CNRS pour pointer ici une question problématique, celle de la procédure de recrutement dite “par voie contractuelle”, réservée aux personnes en situation de handicap (dites “bénéficiaires de l’obligation d’emploi”).

En effet, le CNRS ouvre chaque année une poignée de postes de chargé·e·s de recherche via cette voie (11 postes en 2021). Chaque poste correspond à un institut, une section, un laboratoire de rattachement et une thématique. Toute personne en situation de handicap réunissant les prérequis pour être recrutée comme chargé·e de recherche peut candidater sur un de ces postes : il y a, comme en voie normale, un passage du dossier en section, une audition, une admissibilité puis un passage devant la commission d’inter-classement et une admission. Les dates sont un peu décalées : candidatures du 8 février au 8 mars. La procédure est détaillée ici.

Le problème n’est pas cette procédure qui a l’apparence d’un concours, mais le choix, par le CNRS, des postes mis au concours par cette voie. En effet, à partir du moment où un laboratoire, une section et une thématique (parfois très ciblée, comme c’est le cas en section 36 cette année), sont choisis, il y a peu de prétendant·e·s, a fortiori peu de prétendant·e·s en situation de handicap.

Le choix des postes mis au concours constitue dans ces conditions une étape d’une grande opacité – et laisse particulièrement la place à l’arbitraire : les informations publiques cèdent la place à des informations obtenues en sous-main, à l’oral, et de manière informelle par les candidat·e·s les plus intégré.e.s, auprès de la direction des différents laboratoires notamment.

Il s’agit donc d’une forme particulièrement prononcée de “moustachage” : les postes demandés par les laboratoires, formellement ouverts à tous les candidat·e·s en situation de handicap, sont en pratique calibrés pour un.e candidat·e particulier·ère.

En effet, ce sont les laboratoires (et non les candidat·e·s !) qui demandent un poste. Il faut donc :

  • que le/la candidat·e soit au courant de ce fonctionnement (qui n’est, à notre connaissance, indiqué nulle part),
  • que le/la candidat·e soit en bons termes avec la direction du laboratoire qu’il/elle a identifié.

Ce n’est qu’alors que le laboratoire aura le choix de proposer une fiche de poste… et le dossier du/de la candidat·e pressenti·e. En effet, le dossier des candidat·e·s pressenti·e·s est expertisé avant l’ouverture des postes : c’est sur la base de cette expertise que l’ouverture (ou pas) du poste est annoncée au laboratoire. Or, ni la composition du jury d’examen des dossiers (une même instance pour tout le CNRS, tous instituts confondus), ni les critères (qu’est-ce qu’un bon dossier pour cette instance nationale non disciplinaire ? Les mêmes que dans la discipline de chaque candidat·e ? Avec quelle prise en compte du handicap spécifique ?) ne sont publicisés.

Ceci est d’autant plus préjudiciable que cette procédure, auparavant peu connue, l’est de plus en plus. Si cela est a priori une bonne nouvelle, cela signifie tout de même que de plus en plus de laboratoires demandent des postes et que la concurrence est très rude pour les candidat·e·s en situation de handicap. Or, autant cette solution opaque aurait pu (et encore !) être tenable lorsqu’il y avait peu de demandes, autant l’opacité devient un vrai problème quand les dossiers des candidat·e·s sont fortement trié·e·s en amont.

En d’autres termes : si l’ANCMSP est favorable à une politique d’emploi en faveur des travailleurs en situation de handicap, cette politique se doit d’être transparente tout en donnant les mêmes chances de départ à tout·e·s les candidat·e·s en situation de handicap, et pas seulement aux plus intégré·e·s auprès de leur laboratoire. Cet impératif est d’autant plus prégnant dans un contexte général de pénurie des postes au CNRS.

Que faire dans ces conditions ? Une solution – relativement aisée à mettre en place – , serait d’ouvrir des quotas lors du concours en voie normale (durant lequel il est déjà demandé aux personnes en situation de handicap de se déclarer).

En attendant, bon courage aux candidat·e·s CNRS de cette année – avec une pensée particulière pour ceux et celles qui candidatent par la voie contractuelle.