L’ANCMSP propose un guide à destination des doctorant·e·s au chômage. Contrairement aux idées reçues, il est possible d’être inscrit·e en doctorat et inscrit·e chez Pôle Emploi. Vous trouverez ci-dessous les réponses aux questions les plus fréquemment reçues sur cette situation.
Vous pouvez également télécharger le rapport « Pôle Emploi : un guide pour les enseignant·e·s chercheur·se·s précaires de l’ESR ». Ce rapport est accompagné d’un annexe présentant quelques témoignages reçus. Merci à toutes celles et ceux qui ont partagé leur expérience et leurs questions. Vos retours et vos commentaires seront bienvenus pour améliorer cette ressource.
Guide pour les enseignant·e·s chercheur·se·s précaires de l’ESR (télécharger)
Foire aux questions
A-t-on le droit au chômage si on a financé sa thèse autrement que par un contrat doctoral ?
Exemple : “Pendant les 3 premières années de ma thèse j’ai travaillé à côté en tant qu’enseignante contractuelle en lycée, et il me semble que je suis inscrite à l’université en formation initiale. Maintenant, mon contrat d’enseignante s’est arrêté et je me demande si j’ai droit au chômage (j’ai bien évidemment cotisé pendant ces trois dernières années).”
Réponse : Si vous avez travaillé pendant trois ans, que ce soit un contrat doctoral ou autre chose (y compris, ensuite, un ATER pendant 2 ans) vous avez le droit aux allocations chômage (puisque vous avez cotisé). Le fait que vous soyez inscrite en doctorat n’est pas en soi incompatible avec le statut de demandeur·se d’emploi. Vous devriez avoir obtenu une attestation de fin de contrat du lycée dans lequel vous travailliez, qui doit être fournie à Pôle emploi.
Par contre, être inscrite à Pôle emploi suppose normalement que vous meniez des démarches pour trouver un emploi ; on peut vous demander de prouver cela. En fonction du poste que vous demandez, il s’agit donc de montrer que vous faites des démarches (soit envoi de CV, lettres, entretiens; soit publications, enseignement, communications pour votre CV en tant que chercheuse, veille sur les listes professionnelles et sites spécialisés, etc.).
Peut-on être indemnisé quand on est en doctorat ?
Exemple : “J’ai travaillé pendant ma thèse (petits boulots type secrétaire, caissière, agent administratif, auxiliaire de vie, assistante maternelle…). J’ai eu plusieurs refus d’indemnisation car considérée comme étudiante.”
Réponse : Le fait que vous soyez inscrite en doctorat n’est pas en soi incompatible avec le statut de demandeur·se d’emploi. La formation doctorale n’a pas d’obligation de présence. En théorie, vous pouvez donc avoir un emploi et faire votre doctorat à côté. En revanche, Pôle Emploi vous demandera de prouver que vous recherchez effectivement un emploi.
Les vacations comptent-elles pour ouvrir des droits au chômage ?
Exemple : “Mes (très nombreuses) vacations d’enseignement dans le secondaire et le supérieur n’ont jamais été prises en compte par Pôle Emploi, les universités ne fournissant pas d’attestation employeur. À ce niveau là, pourriez vous m’indiquer s’il y a des droits à faire valoir ?”
Réponse :
La vacation est une activité rémunérée, vous et votre employeur payez des cotisations sociales. A la fin du contrat de vacation, l’employeur a l’obligation juridique de fournir une attestation employeur. Dans de très nombreux cas, en pratique, il vous faut solliciter activement les RH centrales de l’institution qui vous a employé, qui sont dans l’obligation légale de vous fournir cette attestation employeur (envoyée à la fois à Pôle Emploi, et par voie postale à votre domicile).
Par contre, il faut avoir travaillé un nombre d’heures minimum pour pouvoir ouvrir des droits (4 mois, 88 jours ou 610 heures, début 2021 ; après la réforme, 130 jours ou 910 heures). Si vous avez déjà ouvert des droits, les vacations peuvent prolonger vos droits au chômage (avec le même nombre d’heures travaillées au minimum).
Qu’est-ce que “l’attestation employeur” et comment l’obtenir ?
Réponse : L’attestation employeur est un document délivré par l’employeur : il est demandé par Pôle Emploi pour justifier et préciser l’activité salariée qui a été réalisée par l’employé·e. Ce document mentionne la durée, la rémunération, etc. de l’activité réalisée de type non-indépendante (salariée ou proche). Tout employeur a l’obligation légale de fournir à son salarié une attestation employeur en fin de contrat (réf juridique). Pour autant, c’est à l’individu qui sollicite des indemnités de Pôle Emploi de fournir son/ses attestations. Il est donc vivement conseillé de présenter l’ensemble des attestations employeurs possible de la durée maximum prise en compte par Pôle Emploi (les deux dernières années), afin de calculer le montant des indemnités. Il faut donc rassembler l’ensemble des attestations employeurs au plus vite : dès la fin du contrat de travail, ou dès la création d’un dossier chez Pôle Emploi.
A-t-on droit aux allocations chômage si on est auto-entrepreneur ?
Réponse : Si vous avez cotisé avant le passage au statut d’auto-entrepreneur, oui, vous pouvez cumuler vos allocations chômage avec les revenus d’auto-entrepreneur – dans une certaine limite.
Il existe également des dispositifs, en cas de création d’entreprise, qui permettent de percevoir ses allocations chômage “en bloc” et d’ainsi les investir dans le projet d’entreprise.
Est-il possible de faire du travail de terrain (à l’étranger) tout en touchant le chômage?
Exemple : “Je me questionne sur les droits au chômage dans le cas d’un doctorant en co-tutelle, payé par un premier contrat (CDD) en France puis par un second contrat en Allemagne, et sur la façon dont les droits au chômage peuvent être ‘rapatriés’ en France par la suite. Aussi, suite à l’épidémie de Covid, le projet de recherche dans lequel je suis impliquée, et ma thèse, ont pris du retard. Mon travail de terrain en a pâti, mais le budget terrain est prolongé, ce qui n’est pas le cas de mon salaire. Est-il possible de faire du travail de terrain (à l’étranger) tout en touchant le chômage?”
Réponse :
Il n’est pas possible de toucher le chômage en étant domicilié à l’étranger et en y vivant. Pour autant, Pôle Emploi autorise l’individu à prendre 5 semaines de vacances par an (à déclarer avant le départ). Par ailleurs, il est possible, en cas de rendez-vous obligatoire, de décaler un rendez-vous à titre exceptionnel.
En cas de chômage, il est conseillé de prendre contact rapidement avec son/sa conseiller·e Pôle Emploi, et de se rendre au rendez-vous de prise de contact, ainsi qu’aux formations obligatoires. Pour autant, il est ensuite possible (situation courante) de ne pas avoir de contact direct dans un bureau ou une salle de formation avec des agent·e·s de Pôle Emploi pendant plusieurs mois.
Pôle Emploi refuse l’indemnisation chômage au motif qu’il s’agit d’un emploi public (suite d’un contrat doctoral ou ATER). Que faire ?
Réponse : Il est possible que Pôle Emploi produise un refus d’indemnisation, et réoriente la·le demandeur·se vers l’université. En effet, si celle-ci ne cotise pas, elle doit avoir un dispositif d’auto-assurance applicable pour l’indemnisation après des contrats doctoraux ou ATER (avec condition de durée pour l’ATER).
Peut-on être vacataire quand on est au chômage ?
Réponse : Il est tout à fait possible d’être vacataire en étant inscrit à Pôle Emploi et en touchant des allocations. Les revenus de vos vacations vous permettront d’étendre (modestement) vos droits au chômage et de prouver que vous êtes actif·ve dans votre recherche d’emploi. Votre indemnisation mensuelle sera minorée en fonction des heures déclarées, mais les jours non-indemnisés reporteront d’autant la fin de votre période d’indemnisation. Pensez à bien déclarer vos heures réalisées en tant que vacataire lorsque vous vous actualisez sur le site de Pôle Emploi, et à fournir l’attestation employeur lorsque votre contrat de vacation s’arrête. Si votre rémunération de vacataire n’est pas mensualisée, demandez à votre UFR ou aux RH de votre université de vous fournir une attestation provisoire chaque mois du nombre d’heures enseignées.
Comment déclarer des vacations pendant leur réalisation ?
Réponse : Pôle Emploi demande une actualisation mensuelle, et une déclaration des heures travaillées chaque mois. Si vous n’êtes pas mensualisé·e, les universités fournissent parfois la feuille de paye six mois après la réalisation des activités d’enseignement. Vous pouvez demander aux RH (ou à la composante qui vous emploie) une attestation mensuelle précisant le nombre d’heures effectuées et la rémunération de ces heures, indiquant que le paiement sera réalisé en fin de semestre. Transmettez ce document à Pôle Emploi, chaque mois, avec votre actualisation. Ce document est très régulièrement refusé, car il est d’abord traité par un logiciel informatique configuré pour traiter les bulletins de salaires, sur lequel le·a conseiller·e n’a pas de prise, puisqu’il est traité par un autre service. S’il est refusé, appelez le service en charge de l’indemnisation et expliquez la situation. Vous pouvez également tenter de renvoyer l’attestation sur le site de Pôle Emploi en y joignant une courte lettre expliquant votre situation. Normalement, cela fonctionne. Le dernier mois, envoyez les états de service établis (pour prouver que la rémunération que vous recevrez se rapporte aux mois déjà déclarés).
A noter : vous pouvez également ne déclarer vos vacations qu’une fois tous les 6 mois, au moment du paiement, mais vous risquez une régularisation, et on vous demandera de rembourser le trop-perçu pendant les mois où vous aviez travaillé (plus de détails dans le guide).
Quels sont les changements de la réforme du chômage de 2019-2021 ?
Réponse : Depuis le 1er octobre 2021, le montant de vos allocations chômage dépend des salaires que vous avez perçus au cours des 24 mois précédant la fin de votre contrat de travail (36 mois pour les allocataires de 53 ans et plus), au lieu d’une année. Afin de recharger vos droits, il vous faudra travailler au minimum 130 jours ou 910h (environ six mois à temps plein). A titre de comparaison, avec les règles de la convention d’assurance chômage de 2017, pour recharger vos droits au chômage, vous deviez avoir travaillé au minimum 150 heures (soit environ 1 mois).
Ensuite, dans ce calcul basé sur 24 mois, tous les jours sont pris en compte, y compris les jours où vous ne travaillez pas. Jusqu’en 2021, vos allocations étaient calculées sur les seuls jours travaillés. Par conséquent, le nombre de jours pris en compte dans le calcul est beaucoup plus important et réduit, de fait, le montant de vos allocations. Maigre consolation, le nombre de jours non travaillés est plafonné : il ne peut pas dépasser 43% de la période totale.
Pour les modalités de calcul de vos droits, nous vous renvoyons au site de l’UNEDIC.
Quels sont les effets implicites de la réforme pour l’ESR ?
Réponse : La réforme sanctionne de façon générale les parcours dits fractionnés, c’est-à-dire qui alternent période d’activités précaires et période de chômage, comme c’est le cas pour beaucoup de précaires de l’ESR (quand iels sont financé·e·s), qui alternent entre contrat doctoral, contrat d’ATER et vacations en période de chômage. Deux facteurs importants doivent être soulignés :
1/ Le rechargement des droits : du fait de l’allongement de la période prise en compte, vous devez travailler plus. Dans l’ancien système, faire une année de vacations (soit 96h) permettait, a minima, de remplir la moitié des heures demandées pour faire recharger vos droits. Une situation qui était donc déjà très précaire et risquée ! Mais avec la réforme, même faire deux années consécutives de vacations à temps complet (soient 192h), ne permet même pas de remplir un quart des heures demandées !! Ainsi, prendre des vacations pose d’autant plus le risque de ne pas pouvoir recharger ses droits au chômage et d’empiéter sur le temps à trouver un contrat répondant mieux aux conditions imposées par la réforme.
2/ Le montant des allocations : recharger ses droits ne signifie pas pour autant avoir une « bonne » allocation ! Il est important de rappeler que tous les jours sont désormais comptés avec la réforme, y compris ceux non-travaillés. L’objectif de ce nouveau calcul est ainsi de contraindre les chômeur·euse·s à prendre des temps pleins, plutôt que des temps partiels (où les jours non travaillés sont logiquement plus nombreux). Or, ces contrats sont peu nombreux dans l’ESR, ce qui incite à prendre d’autant plus de précautions. Par exemple, une seule année d’ATER à temps plein suffit à recharger ses droits (un mois à temps plein équivaut à 150h travaillées ; 75h pour un demi-temps). Mais dans le cas où vous avez alterné une année de chômage et une année d’ATER à temps plein, vous obtiendrez l’allocation minimale ! La démarche la plus sûre serait donc d’avoir la certitude d’être renouvelé·e dans son contrat.
Quels sont les changements introduits par la réforme de 2022 ?
Réponse : La réforme de 2022, appliquée à partir du 1er février 2023, permet à Pôle emploi de diminuer de 25% la durée d’indemnisation d’un·e chômeur·se nouvellement inscrit·e ou qui doit recharger ses droits (ex : pour une alloc de deux ans, la durée passe à 18 mois) si la conjoncture du marché de l’emploi est dite “favorable”, c’est-à-dire si le taux de chômage est inférieur à 9% ou s’il ne progresse pas de plus de 0,8 point sur un trimestre. En cas de contexte “non-favorable”, la durée d’indemnisation est remise à niveau.
Cette réforme crée plusieurs inégalités :
1/ d’abord géographique, si vous vivez dans une zone où le taux de chômage est plus élevé que la moyenne nationale, vous subissez quand même cette diminution
2/ professionnelle ensuite, puisque tous les secteurs ne connaissent pas le même appel d’offres, comme l’ESR où l’ouverture de poste reste très faible (voir rapports annuels de l’ANCMSP sur les candidatures à des postes titulaires).
En somme, cette réforme incite surtout à trouver un travail le plus rapidement possible, même les plus précarisant.
Les réformes de 2021 et 2022 impactent-elles le calcul chômage/vacation ?
Réponse : Il est toujours possible de cumuler chômage et vacation avec ces deux réformes, mais toujours avec les mêmes problèmes que ça pose. Voici une simulation du calcul (basé sur le modèle proposé par l’UNEDIC) :
Votre Aide de retour à l’emploi (ARE) journalière s’élève à 30,42 euros (allocation minimale et dans le cas où vos allocations n’ont pas été diminuées). Pour un mois de 31 jours, vous avez réalisé 6h de vacations (42,86 euros brut x 6 = 257,16 euros brut)
Calcul :
Etape 1 : calcul de l’allocation
943,02 (allocation mensuelle de 31 jours) – 70% x 257,16 = 763,008
Etape 2 : calcul du nombre de jours d’allocation à verser dans le mois :
763,008/30,42 = 25,08
Donc, Pôle emploi doit vous verser l’équivalent de 25 jours, soit 760,5 euros.
Vos revenus totaux du mois reviendraient donc à : 760,5 + 257,16 = 1017,66 euros.
MAIS, si vous n’êtes pas en mesure de justifier votre rémunération (absence de fiche de paie) lors de l’actualisation, Pôle emploi vous verse un paiement provisoire, équivalent à 70% de vos allocations, compte tenu des revenus déclarés. Il est important de préciser que ce paiement provisoire ne peut pas s’opérer deux mois d’affilée si la situation n’a pas été régulée d’ici la prochaine actualisation. C’est pourquoi il est crucial d’informer Pôle emploi (via agence ou conseillère) le plus rapidement possible de votre situation de vacataire dès le premier refus de votre état de service ou attestation de l’université (le logiciel du site de Pôle emploi ne reconnaît pas ce type de document). Sinon, vos allocations seront gelées pour les mois suivants jusqu’à ce que vous puissiez fournir les fiches de paie. Il ne faut pas oublier que le paiement des vacations, quand il est prétendument mensualisé, reste différé de deux mois. Le risque de voir vos allocations gelées est donc également présent même en cas de “mensualisation”.