La qualification doit laisser place à un recrutement universitaire national

L’ANCMSP a diffusé ce communiqué à ses abonné(e)s le 25 juin 2013, suite à l’annonce d’une possible suppression de la qualification dans le cadre de la loi « ESR » en cours d’examen au Parlement. L’ANCMSP invite également ses lecteurs à consulter sa motion du 23 juillet 2007 sur le recrutement des maîtres de conférences.


Cher-e-s abonné-e-s,

La suppression « surprise » de la procédure de qualification par le Conseil national des Universités (CNU), votée dimanche dernier au Sénat, n’est pas un accident, et sa future réintroduction en commission paritaire mixte ne le sera pas non plus.

Cette manoeuvre porte la marque du désintérêt dont la classe politique fait preuve vis-à-vis des problématiques de l’enseignement supérieur et de la recherche : dédain des propositions formulées aux Assises (où la suppression de la qualification était loin d’avoir fait l’unanimité), maintien d’une « autonomie » universitaire massivement rejetée par celles et ceux qui font les frais de l’absence de budgets, et oubli, surtout, des propositions formulées au cours des dix dernières années, depuis les États Généraux de la Recherche.

Mais puisqu’il est l’heure de formuler des initiatives législatives délirantes pour satisfaire les horizons politiques à court terme de quelques sénateurs, allons-y gaiement, comme on dit !

L’ANCMSP a signé la pétition s’opposant à la suppression de la procédure de qualification : d’abord et avant tout pour dire, comme d’autres associations de la discipline, que le calendrier parlementaire n’est pas un prétexte pour réformer dans l’urgence et la précipitation. Ensuite, parce qu’aucun dispositif alternatif n’est annoncé dans la suite de la qualification, alors qu’en l’état actuel des choses, cette procédure est probablement la pire des solutions à l’exception de toutes les autres.

L’ANCMSP ne peut donc pas soutenir la suppression de la procédure de qualification en l’absence qu’un véritable débat autour du CNU. À cet égard, voici quelques pistes qui nous importent particulièrement :

Le poids des nominations, d’abord. Nous partageons avec la défunte URSS le triste privilège d’entretenir une science d’Etat, c’est-à-dire une science dont les conclusions sont distinguées et récompensées par cooptation ministérielle. L’exemple paroxystique de cette anomalie flagrante est bien connu de tous avec la section 19 (sociologie) dans laquelle un courant « scientifique » lié à un professeur adepte des « tribus » a pu, en toute impunité et contrairement à toute décence, s’auto-promotionner.

S’il faut réformer le CNU, l’ANCMSP demande que l’intégralité de ses membres soient élus et non nommés.

La transparence, ensuite. Les jeunes chercheurs sont sans cesse obligés de traquer les communiqués, les pistes, les fuites, les modèles de dossiers pour savoir quelles sont les exigences de « leur(s) section(s) ». Ce système produit des contraintes souvent étranges, voir souvent contradictoires avec les autres injonctions du champ universitaire, comme l’internationalisation de la communication scientifique.

S’il faut réformer le CNU, l’ANCMSP demande que ce dernier soit contraint de communiquer de manière univoque sur ses critères de fonctionnement.

L’ANCMSP rappelle que des efforts incontestables ont été accomplis par l’ancien et l’actuel CNU 04 sur ce dernier point. Néanmoins, certains problèmes administratifs entravent encore trop souvent les candidats à la qualification.

La rénovation du concours, enfin et surtout. On vante le CNU à faire baisser le poids du localisme dans les recrutements ? Mais pourquoi s’arrête-t-on en si bon chemin ?

L’ANCMSP demande le recrutement national des maîtres de conférences, sur le modèle du CNRS. Ce dernier a plusieurs avantages. Son unité de temps et de lieu évite les problèmes que l’ANCMSP dénonce depuis très (trop) longtemps vis-à-vis de la qualification, à savoir :

  • les coûts de transport pour les heureux candidat(e)s auditionné(e)s plusieurs fois lors d’une même session de recrutement ;
  • les fléchages « à rallonge / à moustaches » qui masquent parfois le recrutement d’un candidat ou d’un collègue dont les travaux ont (par chance) l’avantage de coller presque mot pour mot audit fléchage ;
  • et enfin, le localisme, avec l’obligation d’être recruté pour son poste hors de son université de doctorat.

Cordialement,

L’ANCMSP