Les parlementaires ont examiné le projet de loi de finances pour l’année 2010, dont font partie l’enseignement supérieur et la recherche. Les commissions constatent une augmentation des crédits de recherche, à hauteur d’au moins 1,2 milliards d’euros. D’autres observations (et leur critique) ci-dessous, et une copie du rapport à télécharger.
Si les budgets augmentent dans les colonnes des parlementaires, il faut tout de même signaler que la plus grosse part de ces crédits iront dans le crédit impôt recherche dont la Cour des Comptes a déjà fait observer qu’il fonctionnait très mal (résultats inobservables, inexistants, voire réallocation des financements) [[Source : Cour des comptes, rapport public annuel 2008 ; document à télécharger.]].
Il faut aussi rappeler que, depuis 2004, la stagnation des crédits signifie qu’il faudra plusieurs années d’augmentation avant de retrouver un niveau de dépense intérieure de recherche et développement qui ne classe pas la France parmi les derniers pays de l’OCDE en matière d’effort de recherche [[Source : rapport Audier-Douillard, 2008, ch. 2.]].
Des crédits globalement équilibrés
Le tableau ci-dessous montre comment se répartissent les crédits de paiement pour l’enseignement supérieur et la recherche dans le projet de loi de finances 2010.
On peut observer que quatre grands groupes récoltent chacun environ 7% de crédits : physique, chimie, mathématiques et informatique ; sciences de la vie ; sciences humaines et sociales ; recherches transversales. On observe un équilibre approximatif entre les trois groupes qui représentent schématiquement les “sciences dures” (SD), les sciences de la vie (SV) et les sciences sociales (SHS), qui incluent probablement les lettres et les humanités (LSH).
Des postes de dépenses sous-dotés
La formation doctorale est, dans la répartition des crédits, marginale : c’est un des postes de dépense les plus faibles, qui doivent augmenter au moins en valeur absolue, afin de mieux former aux métiers de l’enseignement supérieur et de la recherche et de mieux préparer les 10 000 docteurs annuels aux opportunités de carrière extra-universitaires.
Enfin, dans ce document, l’AERES est consacrée comme un outil indispensable au système de recherche scientifique français, mais les parlementaires estiment qu’elle doit être mieux dotée. L’ANCMSP suit attentivement le travail de cette agence ; voir notre dossier AERES.
Enfin, en définitive, si peu de choses sur les jeunes chercheurs dans ce document ! À l’exception d’un auto-satisfecit bien obligé sur le contrat doctoral. Le contrat, qui représente certes une avancée sur laquelle l’ANCMSP s’est positionnée avec la CJC, ne règle pas le problème du financement de la recherche des jeunes chercheurs. Les taux de financement chez les doctorants restent ainsi catastrophiques.
Deux autres rapports, “pour avis”
Le rapport de la commission des finances est le rapport général rendu sur l’enseignement supérieur et la recherche dans le cadre du projet de loi de finance, mais les commissions culture et économie ont également des rapports, pour avis. Leurs observations convergent à première vue avec celui de la commission des finances.
On note, dans le rapport “culture”, que les rapporteurs “constatent un écart important du taux d’encadrement des doctorants”. Leurs observations portent aussi sur la durée des thèses :
En SD (2,5) et en SDV (1,5), le rapport Doctorants/HDR est faible en comparaison avec les SHS ou le rapport est de 1 pour 15. La durée moyenne des thèses montre aussi une distinction nette entre les SHS, 60 mois en moyenne et les sciences dures (42,5) ou les sciences du vivant (48).
Un trait positif commun se dégage toutefois des rapports : l’adossement à la recherche d’excellente qualité même si sont encore jugés insuffisants les moyens en personnels et en locaux mis à disposition par les établissements ainsi que le suivi du devenir des doctorants et l’évaluation de la qualité de l’encadrement.
Le rapport “économie” revient, lui, sur le crédit impôt recherche (CIR), et cite le rapport de la Cour des Comptes à son sujet :
[La cour observe que le CIR est aussi] une politique d’emploi, notamment de jeunes doctorants, les dépenses de personnel liées à leur première embauche étant retenues pour le double de leur montant les deux premières années, et les dépenses de fonctionnement afférentes également majorées.
Les rapporteurs déplorent que cette incitation n’a pas eu d’effets spectaculaires, et que le succès du CIR est tout à fait discutable dans son ensemble.
Peut-être faudrait-il un jour se souvenir que la diminution des recettes publiques n’est pas un bon point de départ pour une politique de création d’emplois dans un secteur donné, et que, même si les entreprises répondent aux incentives, cela ne suffira pas à sortir le secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche de la crise de moyens de fonctionnement dans laquelle il se trouve actuellement.