Le Collectif pour la défense de l’Université, co-animé par le juriste Olivier Beaud, a fait saisir le Conseil Constitutionnel d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité. En cause, quatre articles du Code de l’Education découlant de la LRU.
La science politique est concernée au premier chef. Par exemple : le point de l’article L. 712-2 déféré au Conseil Constitutionnel est l’alinéa offrant aux présidents d’université le droit de contester les décisions d’un jury de l’agrégation du supérieur :
« Sous réserve des dispositions statutaires relatives à la première affectation des personnels recrutés par concours national d’agrégation de l’enseignement supérieur, aucune affectation ne peut être prononcée si le président émet un avis défavorable motivé ».
Autre exemple : l’article L. 952-6-1 décrit les nouvelles procédures de recrutement en vigueur, et notamment la création du « comité de sélection » qui remplace désormais la commission de spécialiste dans cette procédure.
Le Conseil a rendu son avis : la décision n°2010-20/21 QPC du 06 août 2010 déclare conformes à la Constitution les procédures de recrutement ainsi que la gouvernance des universités.
S’il valide son caractère constitutionnel, cet avis des Sages ne se prononce naturellement pas sur la qualité de ce texte de réforme du fonctionnement des université. Il appartient désormais aux adversaires de cette réforme problématique de poursuivre leur combat sous d’autres formes.
L’ANCMSP a composé un dossier sur la LRU, où vous pourrez lire la position AFSP-ANCMSP-AECSP sur cette loi. Vous pouvez également lire ici la position de l’ANCMSP sur les nouvelles procédures de recrutement induites par la LRU. À lire également, les modifications que la LRU introduit dans le fonctionnement des « sciences dures ». Enfin, vous ne sauriez quitter cette page sans faire un détour par le texte de la CJC, qui avait proposé une lecture synthétique du projet de loi LRU.
Extraits du communiqué de presse :
Les articles L. 712-2.4° et L. 952-6-1 du code de l’éducation sont relatifs à la procédure de recrutement des enseignants chercheurs par les universités lorsqu’un emploi vient à être créé et déclaré vacant. Des comités de sélection, composés d’enseignants chercheurs et de personnels assimilés, apprécient les mérites scientifiques des candidats et, par un avis motivé, dressent la liste de ceux qu’ils retiennent. Ces dispositions interdisent au conseil d’administration de proposer au ministre chargé de l’enseignement supérieur la nomination d’un candidat non sélectionné par les comités de sélection. Dans ces conditions, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions ne violent pas le principe d’égalité, tous les candidats étant soumis aux mêmes règles. Associant les professeurs et maîtres de conférences au choix de leurs pairs, elles ne portent pas davantage atteinte au principe constitutionnel d’indépendance des enseignants chercheurs. Ce principe serait en revanche mis en cause si le « pouvoir de veto » du président de l’université pour ne pas prononcer une affectation pouvait se fonder sur des motifs étrangers à l’administration de l’université. Le Conseil a donc formulé une réserve sur ce point.
Les articles L. 712-8 et L. 954-1 du code de l’éducation sont relatifs au statut des enseignants chercheurs. Ils reconnaissent des pouvoirs au conseil d’administration qui s’exercent « dans le respect des dispositions statutaires applicables ». Au plus tard, à compter du 12 août 2012, toutes les universités bénéficieront des responsabilités et compétences élargies. Ces articles ne portent atteinte à aucun principe constitutionnel et notamment pas au principe d’égalité et au principe d’indépendance des enseignants-chercheurs.
Le Conseil constitutionnel a donc déclaré conformes à la Constitution les articles L. 712-8, L. 952-6-1 et L. 954-1 du code de l’éducation. Il en va de même du deuxième alinéa du 4° de l’article L. 712-2 sous la réserve relative au pouvoir de veto du président de l’université.
Le Conseil a confirmé sa décision n°83-165 DC du 20 janvier 1984, qui “constitutionnalisait” l’indépendance des enseignants-chercheurs, sans décider pour autant que la LRU entravait ce principe. Les syndicats ont émis des positions ambivalentes au sujet de cette décision, se réjouissant de voir l’indépendance des enseignants-chercheurs confirmée (SGEN-CFDT, dépêche AEF n°136050 du 8 août 2010), mais déplorant aussi le maintien des outils législatifs existants et les pouvoirs “exorbitants” des présidents d’université (communiqué SNESUP-FSU).
La ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Valérie Pécresse, s’est réjouit de ce que le Conseil constitutionnel entérine les comités de sélection, qui doivent permettre “d’accroître la transparence des procédures de recrutement et de lutter contre les risques de localisme” selon le ministère.