Frais d’inscription : continuons à faire reculer le gouvernement

Le gouvernement a annoncé samedi soir (!) qu’il renonçait à mettre en place l’augmentation des frais d’inscription pour les doctorant·e·s extra-communautaires. C’est bien la moindre des choses, tant cette mesure annoncée était discriminatoire, socialement injuste, et nuisible pour la recherche en France. L’ANCMSP, mobilisée sur ces questions en tant que telle et via la CJC (co-organisation d’une journée au Sénat ; appel et recensement des motions universitaires ; manifestations et rassemblements ; pour les plus visibles), s’en félicite, et appelle à continuer et amplifier la mobilisation contre la hausse des frais d’inscription à l’Université pour que cette mesure inique disparaisse désormais de l’agenda gouvernemental pour les étudiant·e·s en licence et master.

D’aucun·e·s minorent voire nient cette victoire en la considérant comme courue d’avance (1). Vue comme une concession prévue par le gouvernement, il n’aurait même pas été nécessaire de se mobiliser. Certes c’est une victoire mineure, mais la hausse aurait tout de même représenté, dans l’hypothèse où les inscriptions des doctorant·e·s extra-communautaires auraient chuté de 90%, une ponction de 7M€ par an à leur encontre, après la phase initiale. Si cette mesure était passée puis généralisée à tou·te·s les doctorant·e·s (comme c’est le souhait du gouvernement, cf. infra), cela représenterait plus de 200M€ par an. Bien sûr, cette annonce du retrait d’une mesure qui elle-même n’existe pas n’offre aucune garantie, les frais d’inscription étant fixés par décret chaque année. Intensifier la mobilisation pour les étudiant·e·s en licence et en master est ainsi le meilleur moyen de prévenir également une prochaine hausse pour les doctorant·e·s.

Interrogeons-nous : ce gouvernement est-il de l’ordre du génie tactique ou de la brute ? Sans doute quelque part entre les deux, même si pour notre part nous penchons vers la seconde option. Il y a un an et demi le cabinet du Premier ministre nous a dit, en entrevue, avoir comme projet d’augmenter les frais d’inscription en doctorat à hauteur de ce qui se fait dans « le système anglo-saxon », soit plus de 10000€ par an, et que les doctorant·e·s là-bas l’acceptent sans broncher (nous avons toussé et changé de sujet). Le gouvernement aurait voulu aller dans cette direction qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Rappelons également que les frais d’inscription en doctorat ont déjà augmenté l’an dernier, avec la CVEC – mesure toute aussi idiote et injuste en doctorat que la hausse des frais d’inscription qui était annoncée cette année.
La CJC, dont nous sommes membres actif·ve·s, a été l’une des rares organisations mobilisées sur la question. Elle a permis, à coup de lobbying auprès des parlementaires et du gouvernement (on vous épargne la liste des RDV et du travail politique effectué, mais elle est disponible sur simple demande), de réduire la coût pour les doctorant·e·s de 10M€ à 6M€ – donc une défaite dans l’ensemble, avec une réduction de la facture. Démarches en coulisse pour des clopinettes, certes, mais qui n’empêchent pas de participer activement aux mobilisations locales et nationales contre la loi ORE, combat que nous n’abandonnons pas, s’il était utile de le préciser.

Au-delà de ces débats et mesurettes, les grands enjeux restent : les frais d’inscription très élevés et discriminatoires pour les étudiant·e·s, ce qui représente une transformation majeure de l’Université.

Il est également urgent de prendre la mesure des discriminations et des difficultés kafkaïennes auxquelles font face les doctorant·e·s et étudiant·e·s étranger·e·s en France dans de nombreux domaines : délivrance et renouvellement des visas, accès au logement, procédures administratives, accès aux droits sociaux, information sur le système institutionnel, sans même parler des discriminations au travail et sur le marché de l’emploi. Les quelques mesures du plan « Bienvenue en France » à ce propos sont très insuffisantes.

Nous appelons à continuer à lutter contre le plan « Bienvenue en France », et prendrons notre part dans la mobilisation. Nous appelons et soutenons les mouvements locaux de non-titulaires et les collègues titulaires les appuyant, usant notamment de la rétention des notes, dont nous croyons en l’efficacité perturbatrice de l’administration, et en la fertilité pour des mobilisations conjointes avec les étudiant·e·s, et pousserons les syndicats de titulaires à prendre des positions conséquentes, au-delà des tribunes et pétitions, stratégies de lutte pour l’opinion publique qui ont globalement démontré leur inanité. Le prochain rassemblement, mercredi à Jussieu à 12h, permettra peut-être d’avoir des débats allant dans cette direction.

Le bureau de l’ANCMSP

(1) A rebours de celles et ceux qui laissent entendre que ce « recul » n’en est pas un et était prévu à l’avance, comme si une hausse des frais pour les doctorant·e·s ne risquait pas d’arriver, l’analyse d’« Université ouverte » nous apparaît plus mesurée et réjouissante. Elle pointe un recul, tout en notant très justement le fait qu’il ne règle en rien les problématiques auxquelles sont confrontées les doctorant·e·s étranger·e·s et la nécessité d’amplifier la mobilisation et de rester uni·e·s, afin d’obtenir l’annulation de la hausse pour tou·te·s les usager·e·s.