Alors que la session 2020 de recrutements CRCN au CNRS se termine, nous publions notre 2e rapport annuel sur ce concours.
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Ce bilan concernant la campagne de recrutement 2019 des chargé·e·s de recherche (CR) au CNRS dans les sections 36 (« Sociologie et sciences du droit ») et 40 (« Politique, pouvoir, organisation ») s’inscrit dans la continuité d’un premier bilan consacré à la campagne 2018.
L’objectif de ce bilan est d’analyser les pratiques de recrutement d’une institution centrale du champ académique français. Reconnue mondialement pour son excellence scientifique, le CNRS est aussi une institution représentative des rapports de force à l’oeuvre dans le champ universitaire français. Tout d’abord, la baisse continue du financement pérenne de la recherche et du nombre de postes de fonctionnaires touche cette institution comme les autres. La direction du CNRS a fait en effet encore une fois le choix de diminuer le nombre de postes ouverts au concours en 2019 (249 postes contre 300 l’an passé), ce qui confirme et accentue une tendance à la baisse du recrutement des chercheur·se·s titulaires au CNRS. Pour ne citer que deux chiffres, en 2019, seul·e·s 3 chargé·e·s de recherche ont été recruté·e·s en sociologie, et 4 en science politique.
Cette pénurie des postes se conjugue avec des pratiques de recrutement toujours plus délétères de la part de la direction du CNRS : pour la troisième année de suite, un candidat en section 36 a été déclassé par le jury d’admission du CNRS, la direction du CNRS ayant annoncé au préalable à la section que le candidat ne serait pas recruté. Cette “affaire” est avant tout une rupture d’égalité grave dans le concours, que la direction du CNRS n’a rien fait pour réparer malgré nos appels répétés. Plus largement, elle exprime une opposition entre une vision managériale de la recherche, animée par des objectifs gestionnaires versus une recherche autonome, reposant sur l’évaluation par les pairs. Ce clivage n’est pas propre au CNRS, et encore moins à la sociologie et à la science politique. Toutefois, l’affaire des déclassements en est une illustration particulièrement claire et c’est pourquoi ce rapport, comme celui de l’année précédente, revient longuement sur ce sujet.
Après une première partie consacrée aux déclassements et aux mobilisations pour l’emploi au CNRS en 2018-2019, le rapport s’intéresse dans un second temps à la composition des jurys d’admissibilité en sections 36 et 40, avant d’analyser le profil des candidat·e·s auditionné·e·s et admis·e·s. En résumé, nos analyses révèlent qu’il s’agit d’un concours très élitiste, privilégiant les candidat·e·s français·e·s ayant soutenu leur thèse dans un établissement parisien, et disposant d’un nombre conséquent de publications. Nous le verrons, certaines thématiques de recherche semblent également privilégiées par le jury dans le choix des candidat·e·s auditionné·e·s. Plus généralement, l’analyse du recrutement au CNRS montre que ce processus est plus qu’imparfait : les critères de sélection restent peu clairs et le concours demande la constitution d’un dossier important alors que le nombre de candidat·e·s auditionné·e·s est réduit.
Nous espérons donc que ce rapport permettra aux candidat·e·s de se préparer au mieux à ce concours et d’en connaître les logiques. Nous souhaitons également que nos remarques sur son déroulement conduisent les jurys et la direction du CNRS à améliorer leurs pratiques. Ceci suppose a minima une égalité réelle face aux concours de la fonction publique, qui peut se traduire en des dispositifs comme des critères plus serrés, objectivables et publicisés, ainsi que des modifications du droit pour que les jurys, y compris les jurys d’admission, rendent des comptes sur leurs décisions – et enfin une représentation équitable des sous-disciplines qui sont dans le périmètre de chaque section.