Camarades,
Chèr·es collègues,
Le 24 mai dernier, sont parus les résultats du jury d’admission d’un certain nombre de sections du CNRS. Comme nombre de collègues, les membres du bureau de l’ANCMSP ont été atterré·es d’apprendre le sévère déclassement qui, en section 36 – « Sociologie et Sciences du Droit » – a relégué au 8ème rang le candidat initialement classé premier par le jury d’admissibilité. Le classement ne s’est pas simplement “décalé” pour autant vers le haut, puisque le jury d’admission a par ailleurs hissé un candidat de la sixième à la deuxième position.
Nous avons tous·tes en mémoire le déclassement en 2019 des candidats Matthieu Grossetête et Akim Oualhaci qui avait abouti à l’annulation du concours de cette même section par le Tribunal administratif (TA), au motif d’une rupture d’égalité devant le concours induite par les pressions de la direction de l’Institut des sciences humaines et sociales (InSHS) sur le jury d’admissibilité de la section 36. Les candidat·es admis·es de 2019 avaient alors perdu le statut de fonctionnaire. La réitération d’un tel fiasco collectif à l’échelle du CNRS (rappelons que les décisions du jury d’admission de l’InSHS sont théoriquement prises collégialement) est inadmissible et requiert a minima une justification, ce dans les plus brefs délais !
Dans un contexte où la direction du CNRS demande à ce que les jurys de section ne communiquent pas le classement des candidat·es par ordre de mérite (et ce malgré l’avis de la CPCN), il est essentiel d’exiger la transparence dans les recrutements d’agent·es du service public. Cette nouvelle polémique autour de la campagne CNRS ne fait qu’illustrer – s’il le fallait encore – l’opacité des pratiques d’évaluation et de sélection des candidat·es, conformément à ce que devient l’ESR dans sa globalité. Le mépris institutionnel dont témoigne la direction de l’InSHS ne fait que renforcer l’insécurité juridique, professionnelle et financière qui caractérise le quotidien des candidat·es aux métiers de la recherche. La pratique du déclassement est d’une violence inouïe pour ces personnes, souvent candidat·es depuis de nombreuses années à un concours extrêmement exigeant, et dont le classement initial démontre pourtant leurs qualités de chercheur·ses.
La persistance de l’InSHS dans ces pratiques délétères – ce en dépit du jugement antérieur du TA – est par ailleurs un désaveu flagrant de la section 36 du CNRS, de son travail de sélection des candidat·es et de sa légitimité à choisir ses recrues. Il succède à la litanie d’offenses qui semble aujourd’hui structurer les rapports de la discipline avec ses tutelles : procès en islamo-gauchisme et intersectionnalisme par les ministres Vidal et Blanquer ; renforcement de la part des nominé·es (plutôt qu’élu·es par les pairs) dans la composition des sections ; réforme du concours en vue de marginaliser le rôle des jury d’admissibilité ; permission d’administrer souverainement les miettes de postes attribués (3 en 2021, 4 en 2020) quand les files d’attente pour la titularisation ne désemplissent pas etc.
Face à un tel acharnement, l’ANCMSP exhorte les membres du jury d’admission à se manifester et à clarifier le processus de décision ayant mené à ce déclassement. Elle s’associe également aux inquiétudes formulées par l’AFS et l’ASES quant à l’avenir de la sociologie au CNRS.
Ici, pointe un autre motif d’inquiétude : la faible portée des réactions collectives face à cette nouvelle injustice subie par un collègue. Une fois publiés les communiqués d’associations représentatives et de syndicats – nous compris -, de quoi sera faite la défense de nos disciplines, de nos métiers et de leurs travailleur·ses précaires, premières victimes de ces attaques ?
L’ANCMSP s’engage avec les collectifs locaux de précaires mobilisés et appelle l’ensemble des collègues – et notamment nos collègues titulaires, dans l’optique de luttes communes – à adopter dans les mois qui viennent des positions fermes et combatives, assorties de modes d’action conséquents : grèves, rétention de notes, blocages de toutes sortes, etc. À défaut, la cogestion amiable de la pénurie nous condamne à observer les effets de l’étiolement politique de la profession.
Bien cordialement,
Le Bureau de l’ANCMSP